Timothy Brook : Le chapeau de Vermeer
Publié le 23 octobre 2010 par Alexandre dans la (les) catégorie(s) Uncategorized

À croire ce que l’on en dit, la mondialisation est née au tournant de ce siècle. Mais alors, qu’en était-il des siècles derniers? Est-ce que le commerce international est né voilà seulement quelques décennies?
Pour trouver la réponse, Timothy Brook plonge dans son regard sur les toiles du peintre hollandais Johannes Vermeer (1632-1675), aujourd’hui considérées comme des chefs d’œuvres du XVIIe siècle. De son vivant, il n’a jamais été un peintre reconnu et il s’en est fallu de peu pour qu’il ne le soit jamais. Il faudra attendre le XIXe siècle pour que les collectionneurs et les conservateurs de musées remarquent le talent de ce peintre de Delft. Les 35 toiles qui nous sont parvenues à ce jour – une 36e a été volée en 1990 et n’a jamais été retrouvée – sont dispersées dans 17 musées, de Manhattan à Berlin.
La particularité des œuvres de Vermeer est qu’elles ouvrent une formidable fenêtre sur le XVIIe siècle. Le peintre compose en effet ses toiles avec des objets de la vie quotidienne, « moins pour montrer une réalité objective que pour présenter un scénario précis » (p.20). C’est ainsi que Timothy Brook considère chacun de ces objets comme autant d’accès pour « pénétrer dans des couloirs menant à des découvertes sur le monde du XVIIe siècle que les peintures ne révèlent pas par elles-mêmes, et dont l’artiste lui-même n’était probablement pas conscient » (p.21).
C’est ainsi qu’en prenant quelques objets représentés sur ces toiles, Timothy Brook va parvenir à démontrer que les échanges internationaux étaient florissants à l’époque. Par exemple, la jatte de fruits qui apparaît dans La liseuse à la fenêtre démontre l’existence d’un commerce de la porcelaine avec la Chine, tandis que le chapeau de feutre dans L’Officier et la jeune fille riant permet de retracer les liens commerciaux de la circulation de tissus et de peaux, dont celles de castor. Si la Vue de Delft et Le géographe sont tout indiquées pour mieux saisir l’importance du commerce maritime, La femme à la balance nous invite à découvrir les systèmes d’échanges en vigueur à l’époque.
« Mon choix ne s’est pas porté sur ces sept peintures uniquement pour ce qu’elles montrent, mais pour les allusions aux forces historiques de plus grande ampleur qui se dissimulent dans leurs détails. En nous penchant sur ceux-ci, nous découvrirons des liens cachés avec des sujets qui ne sont pas tout à fait évoqués, et des lieux qui ne sont pas réellement montrés. Les connexions que révèlent ces détails ne sont que suggérées, mais elles n’en sont pas moins présentes » (p.18).
Un livre qui permet de découvrir comment les toiles de Vermeer sont autant d’outils pour comprendre les échanges commerciaux mondiaux qui existaient au XVIIe siècle.
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Timothy Brook
LE CHAPEAU DE VERMEER
LE XVIIe SIÈCLE À L’AUBE DE LA MONDIALISATION
Payot, Paris, 2010, 299 pages.