Dimanche 10 décembre 2023

Pour une règlementation du prix du livre au Québec

Publié le 02 septembre 2012 par dans la (les) catégorie(s) Billet

Pour une règlementation du prix du livre au Québec

Le 22 août 2012, la Table de concertation du livre publiait une lettre afin de demander aux différents partis politiques de se prononcer à propos d’une politique du prix unique pour le livre au Québec.

Dans ce document, la Table souligne tout d’abord l’importance du secteur du livre, non seulement du point de vue culturel – « Le livre demeure le principal vecteur du savoir; il porte la culture et la mémoire des peuples » (p.1) – mais aussi économique. Cette filière emploie 12 000 personnes et génère un chiffre d’affaire annuel de 800 M$. Il se publie près de 4 500 titres par année, ce qui, au prorata de la population, place le Québec à égalité avec la France, l’Italie et l’Allemagne.

Toutefois, tous les livres publiés ne sont pas des succès en librairie, et il est normal que certains romans, essais ou recueils de poésie ne se vendent pas à des milliers d’exemplaires. Pour qu’une librairie puisse proposer un catalogue vaste et intéressant de livres, il faut qu’il existe un certain équilibre entre les meilleurs vendeurs et les autres livres. Malheureusement, ce problème n’existe pas pour les grandes surfaces : elles ne s’intéressent qu’aux meilleurs vendeurs, les offrent à des prix légèrement inférieur à celui des librairies et ne proposent qu’une très petite sélection de livres, ce qui vient appauvrir la diversité de publications offertes. D’autant plus que dans les grandes surfaces, il est impossible de bouquiner tranquillement, de découvrir des livres ou de s’informer auprès d’un libraire. Sans oublier la concurrence des sites web transactionnels.

Chez nos voisins du Sud, l’absence de régulation a fait des ravages :

« (…) La seconde chaîne de librairies en importance, Borders, a fait faillite en 2011, tandis que la première chaîne, Barnes & Noble, cumule les pertes trimestre après trimestre. Au sud de la frontière, on ne fait pas que couper les prix ; Wal-Mart et Amazon sont allés sous le prix coûtant pour les titres du palmarès, pour enlever des parts de marché. Cela en est au point où des éditeurs, craignant la mainmise sur le marché par Amazon, se liguent pour imposer le respect d’un prix décent. Et voilà qu’Amazon s’est fait éditeur en 2011, en débauchant à coup de millions des auteurs connus » (p.2).

Déjà, plusieurs pays ont adopté des politiques du prix unique, dont l’Allemagne, la France, l’Italie, l’Argentine, la Corée du Sud, le Mexique, la Norvège, la Hongrie, la Grèce, l’Espagne, l’Autriche, le Japon, les Pays-Bas, le Portugal, et, tout récemment, Israël. De leur côté, le Brésil et la Pologne, entre autres, ont mis le projet à l’étude.

Dans les pays adoptant pareille loi, quatre grandes observations ont été effectuées :

  • Que le réseau de librairies s’y est maintenu et développé ;
  • Que ce réseau n’a pas empêché les grandes surfaces, les clubs de livres ou les sites Internet de se positionner sur ce marché ;
  • Que de nouvelles entreprises d’édition ont pu voir le jour et, avec elles, des milliers de livres qui ne seraient autrement jamais parus ;
  • Et que le prix du livre a moins augmenté en moyenne que l’ensemble des biens de consommation.

C’est pour favoriser le milieu du livre au Québec que la Table propose d’adopter une politique du prix unique. Les modalités de cette politique seraient que :

  • Dans les neufs mois suivant la sortie d’un nouveau livre, personne ne devrait pouvoir consentir un rabais de plus de 10 % du prix de détail suggéré ;
  • Après neuf mois, le prix serait laissé à la discrétion de chaque commerçant.

La Table souligne aussi l’urgence d’agir maintenant :

« Un autre point sur lequel toute la filière du livre s’entend, c’est qu’il faut le faire maintenant si on veut préserver la plus grande industrie culturelle québécoise et la possibilité pour le consommateur d’y trouver son compte. Les guerres de prix ont anéanti des pans entiers du réseau de distribution dans les pays anglo-saxons en quelques années à peine. En Australie, une ville comme Greareer Dandenobg, 140 000 âmes, n’a plus de librairie; au Québec, seules six villes ont plus de 140 000 habitants. Ces guerres ne font que débuter chez nous. Si on leur laisse libre cours, il est certain qu’il y aura bientôt moins de libraires, moins d’éditeurs, moins d’emplois et moins de choix. Ce qui est en jeu aujourd’hui même, c’est la protection de l’accès au savoir ainsi que la préservation du plus important volet de notre création culturelle. Existe-t-il plus important devoir pour l’État québécois ? » (p. 3).

Lancée en pleine campagne électorale, le document de la Table de concertation du livre n’a pas laissé les partis politiques de glace. Dans son édition du vendredi 31 août 2012, le quotidien Le Devoir dévoilait que tous les partis majeurs (Parti libéral, Parti Québécois, Coalition avenir Québec et Québec Solidaire) ont répondu à l’appel et ont affirmé qu’ils ne resteraient pas insensibles à la question une fois la campagne électorale passée.

Espérons que les écrits resteront …


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