Les jeunes de Montréal et la culture
Publié le 01 octobre 2012 par manouane dans la (les) catégorie(s) Billet

Publiée le jeudi 27 septembre 2012, l’étude intitulée La Participation culturelle des jeunes à Montréal tente de répondre à ces questions : Comment les jeunes sont-ils actifs culturellement ? Quelles sont les motivations derrière cet engagement chez les jeunes ? Quels sont les impacts de la culture et comment s’articule cette participation à l’ère du numérique ?
L’objectif principal de cette étude est de mieux saisir et comprendre les diverses facettes de la participation aux arts et à la culture chez les jeunes, tant en termes de création, de consommation/fréquentation que de diffusion/partage, ainsi que l’évolution (et les mutations) des pratiques culturelles au fur et à mesure du cheminement biographique des individus (page i).
Pour trouver des réponses, le sociologue Christian Poirier a dirigé 37 entrevues individuelles de 30 à 120 minutes chacune, et quatre rencontres de groupes réalisées avec 58 jeunes âgés de 12 à 34 ans. Toutefois, le chercheur souligne un biais dans sa méthodologie : « les jeunes rencontrés sont culturellement actifs ; nous avons à cet égard choisi des jeunes qui participent afin de mieux connaître ce qu’ils font et ce qu’ils pensent de la culture, et non s’ils participent ou pas » (page 11).
Les résultats
Globalement, cette étude démontre plusieurs éléments, dont ceux-ci :
- Il est confirmé que l’intérêt pour la télévision est en déclin, surtout chez les 12 à 17 ans;
- La famille est le premier vecteur de transmission de l’intérêt pour les arts et la culture;
- Les pratiques des jeunes combinent des approches traditionnelles et numériques;
- L’intérêt va de la culture populaire (Lady Gaga) à une culture plus pointue (le théâtre de Wajdi Mouawad), avec un intérêt marqué pour la culture québécoise;
- La mobilité est centrale (il suffit d’un sac à dos, d’iPod et d’un téléphone portable);
- C’est seul, dans leur chambre, que les jeunes s’engagent dans la culture.
Dans la conclusion, Christian Poirier écrit :
La recherche montre également la vaste panoplie des impacts de la culture chez les jeunes. Elle contribue à leur construction identitaire, leur permet de gagner confiance en eux, d’avoir une bonne santé physique et psychologique, de prévenir le décrochage scolaire et d’éviter la délinquance. Les impacts sociaux sont aussi bien présents : création de liens d’amitié, rencontres interculturelles, rapprochements entre les communautés francophone et anglophone de Montréal, développement d’un sentiment d’appartenance au quartier et à la ville, renforcement des liens sociaux et de la cohésion sociale, engagement sociopolitique et communautaire, entre autres (page 146).
De façon plus globale, cette étude propose aussi des pistes de réflexions autour des notions de culture, de participation culturelle et de citoyenneté culturelle. Il faut dire que les « les pratiques culturelles ont connu une complexification remarquable » (page 4). À titre d’exemple, il est difficile aujourd’hui de cantonner les consommateurs de culture dans une position strictement passive. Bien au contraire, ils sont actifs, jouant aussi un rôle de diffuseurs, rôle auquel n’échappent pas les jeunes de Montréal interrogés. Les consommateurs sont aujourd’hui des « prosommateur », contraction de producteur et de consommateur, terme proposé par l’écrivain Alvin Toffler. Basé sur le matériel ainsi récolté, le sociologue Christian Poirier consacre la seconde partie de la conclusion de son rapport à une analyse du concept de citoyenneté culturelle et à une présentation de ses principales composantes.
Et qu’en est-il de la lecture?
Dans la synthèse générale, il est indiqué que :
La lecture rejoint plusieurs jeunes rencontrés. Ainsi, la quasi-totalité des 12-17 ans et des 18-24 ans lit, avec cependant des degrés variés : lecteurs occasionnels ou assidus, réguliers dans leur pratique ou fonctionnant plutôt par phases, adeptes de séries à la mode, de classiques ou même de livres de motivation personnelle ou de témoignages. Les modalités d’accès aux livres sont également variées : bibliothèques, collection familiale, cadeaux, achats personnels, prêts entre jeunes… Au sein des groupes, ce sont surtout les filles qui disent lire, cette activité étant équilibrée dans le reste de l’échantillon (page 35).
En ce qui a trait aux bibliothèques :
La bibliothèque est assez peu visitée par les jeunes de 12 à 17 ans ainsi que ceux des groupes de discussion. Elle est toutefois fréquentée par la majorité des 18-24 ans. Quant à eux, les participants de 25 à 34 ans ont assez peu abordé la question lors des entretiens. Est-ce le signe d’un certain détachement à l’égard de ces institutions ? Cela est assez difficile à confirmer. Chez les plus jeunes, E1 [les participants sont identifiés par une lettre et un chiffre pour préserver leur identité] visite de manière régulière la Grande Bibliothèque, tandis que C10 emprunte des livres à la bibliothèque de son quartier. Les autres y vont de temps à autre ou pas du tout. Chez les plus âgés, A2 fréquente aussi la Grande Bibliothèque et B5 amène son fils à la bibliothèque de leur quartier. Les autres n’en font pas mention.
Les 18-24 ans se distinguent parmi les tranches d’âge puisqu’ils fréquentent presque tous la bibliothèque. La Grande Bibliothèque et les bibliothèques de quartier sont visitées afin d’emprunter des livres et des CD, étudier ou bouquiner et faire des découvertes. Plus que d’être fréquentée, la bibliothèque fait souvent l’objet d’un attachement important. Par exemple, B2 dit de la Grande Bibliothèque que c’est son « endroit préféré sur terre » tandis qu’E4 affirme qu’elle se sent littéralement chez elle à la bibliothèque de son quartier : « I’d say it’s really peaceful and people are just very calm and they’re just there to read and just work. It’s a nice environment and I feel at home there » (page 41).
Le rapport est disponible gratuitement dans une version abrégée de 177 pages sur le site de Culture Motnréal (culturemontreal.ca).